Extrait
DISTANCES – Temps libre et clos (appréhensions)
Chacun vaque à son désœuvrement, assigné à résidence. Le besoin de remplir ses placards s’aiguise à mesure que progressent les restrictions. Sans boulot on boulotte. On comble sa vacuité comme un écureuil prépare l’hiver. Le virus nous rappelle à l’archaïque, rarement à l’essentiel. Dépouillés de nos « vies bien remplies », nous bourrons nos caries de sucres lents ou rapides, contre nos monstres intérieurs. Par chance, les voies numériques assoient nos addictions aux écrans dans l’écrin confiné de nos repaires capitonnés. Au creux des nids piaillent les faims de tous les mondes. Qu’allons-nous faire de notre temps retrouvé ? Car oui, à force de croire qu’il est perdu s’il est libre, on le retrouve quand on l’engeôle. Enjolivons-le, plutôt ! L’avoir et le faire en berne laisseront-ils du champ à l’être ? Se rendra-t-on alors compte à quel point s’être fait avoir ? Las, l’humain peut jouir de tout, y compris du rien. Il s’invente un autre monde possible… le temps de reprendre la grande précipitation précédente et de la vivre comme une renaissance.